À l’approche de la date de la soumission de la déclaration des revenus, plus tôt cette semaine, des artistes de partout au Canada ont été alarmés d’apprendre que l’artiste Steve Higgins faisait l’objet d’une vérification de l’Agence du revenu du Canada(ARC).
D’un côté, il n’est pas surprenant que des artistes puissent être placés sous la loupe de l’ARC. En effet, on est plus susceptible de faire l’objet d’une évaluation si on est travailleur autonome, si on déclare régulièrement des pertes d’entreprise ou si son revenu varie considérablement d’une année à l’autre.
Cependant, les circonstances qui entourent cette vérification sont particulièrement préoccupantes, car il semble que l’ARC considère que la pratique de l’artiste correspond à une activité personnelle ou à un passe-temps plutôt qu’à une entreprise. L’Agence s’appuie sur une affirmation selon laquelle les revenus provenant de subventions, d’honoraires et de prix plutôt que de la vente d’œuvres art ne seraient pas admissibles aux déductions de dépenses connexes.
Cette décision est inquiétante pour plusieurs raisons. Premièrement, le bulletin de l’ARC IT-504R2 énonce les facteurs utilisés pour déterminer si un artiste présente une attente raisonnable de profit et a obtenu un statut professionnel. Or, M. Higgins a amplement fait la preuve qu’il répond à ces critères. De plus, le fait de ne pas tenir compte du financement public comme source de revenu admissible à partir duquel des dépenses peuvent être déduites témoigne d’une méconnaissance fondamentale du contexte des artistes contemporains au Canada et, de surcroît, cela ne cadre pas non plus avec les recommandations que fournit l’ARC elle-même !
CARFAC fournit de l’aide à M. Higgins au cours de son processus d’appel, notamment parce qu’il est inenvisageable que son dossier établisse un précédent pour tous les artistes. Nous savons maintenant que d’autres artistes ont subi une vérification ou une réévaluation récemment pour diverses raisons, et nous tentons de déterminer s’il existe d’autres tendances inquiétantes. Nous invitons les artistes à communiquer avec nous s’ils ont récemment fait l’objet d’une vérification de la part de l’ARC, afin que nous puissions mieux cerner le problème.
Sur un front plus large de défense des droits, la Coalition canadienne des arts a formé un groupe de travail sur la fiscalité des artistes, lequel est sur le point d’envoyer une lettre au ministre du Revenu du Canada afin de lui faire part de ses préoccupations concernant les récentes vérifications appliquées à des artistes canadiens et de lui demander une révision des politiques concernant la fiscalité. Nous aiderons toute personne souhaitant appuyer cette démarche en écrivant à son député et aux ministres concernés ; les détails vous parviendront bientôt. Nous espérons également convoquer une réunion des organismes nationaux de services aux arts et d’autres intervenants pour discuter des questions de politique fiscale afin de proposer des changements importants, tels que l’étalement du revenu ou des allégements fiscaux sur les subventions, les prix et les droits d’auteur.
Nous espérons que le processus d’appel de M. Higgins aura un résultat positif et que son expérience aura été une anomalie malheureuse plutôt que le signe d’un changement de direction à l’ARC. Nous espérons également que les discussions issues de cette situation conduiront à un changement de politique positif pour tous les artistes.
En toute solidarité,
April Britski,
Directrice générale nationale de CARFAC et coprésidente du groupe de travail sur la fiscalité des artistes de la Coalition canadienne des arts.